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Violence Jeune.  

MERCREDI 15 DÉCEMBRE 2010
 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 11e partie 
CONCLUSION  
 
Les résultats de cette étude démontrent que les jeunes sont aux prises avec trois principales sources de conflits : les rapports entre les parents et les jeunes, les rapports entre les pairs dont les relations entre les garçons et les filles et enfin les rapports interethniques. Ces rapports sociaux peuvent être à l’origine de la violence s’il n’y a pas négociation du pouvoir entre les parties. Ces relations sont des rapports de force et elles caractérisent l’ensemble des rapports sociaux. C’est à l’intérieur de ces rapports de pouvoir que se négocie ou s’acquiert par la force une partie de ce pouvoir qui revient à chacun des protagonistes. 
 
Dans l’esprit des jeunes interviewés, un individu violent est un individu souffrant. En général, c’est cette souffrance qui le conduit à adopter des attitudes et des comportements violents. Toutefois, ils associent davantage la violence à des gestes de brutalité. La souffrance physique est plus concrète à leurs yeux, alors que la souffrance psychologique est abstraite et difficilement identifiable. 
 
La violence est comprise comme l’affirmation d’un pouvoir et la recherche d’un contrôle. Cette recherche de contrôle tire sa source dans le sentiment d’impuissance que ressentent certains jeunes. Ces derniers ont le sentiment que les adultes ne les comprennent pas. Ils se sentent marginalités et exclus. Alors qu’on leur demande d’assumer leurs responsabilités, la société leur reconnaît peu de pouvoir et elle les isole avec des valeurs de concurrence et de performance. Cette frustration des besoins d’affirmation et de valorisation crée un sentiment d’impuissance. L’objectif du comportement violent devient alors la prise d’un pouvoir par le contrôle de l’environnement immédiat. 
 
Pour prévenir la violence et promouvoir des rapports de coexistence pacifique et égalitaire assurant l’autonomie, la liberté et le plein développement de tous les individus, il faut intervenir au niveau des quatre principaux agents de socialisation des jeunes : la famille, l’école, les médias et les groupes d’appartenance. Les actions préventives doivent devenir une priorité d’intervention et se faire en concertation avec les différents partenaires (les institutions du réseau public et les groupes communautaires). 
 
On peut prétendre que l’intégration de nouvelles valeurs favorisant des rapports plus égalitaires entre les individus est en progression au Québec. Toutefois, il importe de poursuivre le travail d’éducation auprès des jeunes afin de faire tomber de nombreux préjugés et stéréotypes qui nuisent toujours à la construction de rapports plus harmonieux et conviviaux entre garçons et filles, entre jeunes de groupes ethniques différents, etc. Cependant, la souffrance des individus ne pourra jamais excuser leurs gestes de violence dans les rapports interpersonnels. Mais la compréhension de cette souffrance par les intervenants et les intervenantes peut les aider à développer des moyens pour prévenir cette violence. Il importe d’amorcer le dialogue et de promouvoir des rapports égalitaires entre les individus et entre les groupes d’individus (homme et femme, majoritaire et minoritaire, etc.) tout en privilégiant la négociation et la médiation comme moyen pour résoudre les conflits. 
 
Cette étude soulève plusieurs questions et ouvre quelques pistes de recherche. Un niveau de questionnement concerne la relation qui existe entre les représentations sociales d’un groupe et le développement de conduites à son égard. Jusqu’où l’information qu’un individu possède sur un groupe social donné influence-t-elle ses attitudes et ses conduites envers ses membres? Comment l’information que les adultes ont des jeunes par les médias influence-t-elle leurs attitudes envers eux? 
 
MARDI 14 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 10e partie 
UNE HYPOTHÈSE DE LA TRAJECTOIRE DE LA VIOLENCE 
 
L’expression de la violence suit une trajectoire. Le récit des jeunes a permis de construire l’hypothèse d’un modèle (tableau 1), mais cette trajectoire peut varier d’un individu à un autre et doit être lue de façon dynamique et circulaire. 
 
Cette trajectoire démontre qu’un ou des stress sont à l’origine d’une atteinte ou d’une souffrance chez un individu. Ce dernier est ainsi privé de la satisfaction d’un besoin. Il risque alors de se sentir frustré. Afin d’éliminer la source de cette frustration, l’individu cherche de cette frustration, l’individu cherche des solutions dans son répertoire de stratégies pour régler les conflits. Il trouvera possiblement une solution à son problème. Si ses efforts le conduisent plutôt à un échec, il risque alors de développer un sentiment d’impuissance. Ce sentiment d’impuissance sera accompagné soit d’un sentiment de colère et d’agressivité ou encore d’un sentiment de peine et de tristesse. L’individu chemine à travers ces différents sentiments. Ils peuvent le conduire à tenter de reprendre le contrôle et le pouvoir sur la situation qui lui échappe. Deux solutions s’offrent alors à l’individu, soit la négociation avec son environnement ou l’adoption d’un de deux types de comportements violents, les comportements autodestructeurs ou les comportements d’agression vers l’extérieur (contre des objets, des animaux ou des individus). S’il a choisi la négociation, il explore alors son répertoire de stratégies pour solutionner le problème. Ces choix peuvent enfin lui apporter une solution ou provoquer un nouvel échec. Dans ce dernier cas, ce revers risque d’augmenter son sentiment d’impuissance et par le fait même ses sentiments de colère et d’agressivité ou de peine et de tristesse. Si, toutefois, il a choisi d’adopter des comportements violents, c’est qu’il a éliminé toutes les autres solutions possibles. Il s’isole et son répertoire de stratégies se cristallise autour d’une seule solution, l’utilisation de la violence. Il peut alors obtenir un règlement ou un nouvel échec. S’il obtient un règlement, cela renforce alors son comportement violent. S’il y a défaite, cela accentue son sentiment d’impuissance et les sentiments qui en découlent. 
 
Le répertoire de stratégies pour solutioner les conflits ainsique l’évaluation que l’individu fait de son succès ou de son échec dépendent, en grande partie, de tout le processus de socialisation de ce dernier. De surcroît, les rapports interpersonnels – entre les hommes et les femmes, entre individus d’origines ethniques différentes ou entre individus appartenant à d’autres groupes sociaux – sont modelés par la société. Les parents, l’école et les médias sont les principaux porte-parole de cette culture. Ce sont eux qui donnent aux enfants, par les valeurs qu’ils véhiculent, par les méthodes éducatives qu’ils utilisent et par la nature des relations qu’ils tissent, des modèles de rapports sociaux. C’est à partir de cette information que les jeunes se construisent uen représentation sociale des relations interpersonnelles. De plus, c’est cette représentation, en grande partie, qui guide la conduite des jeunes. Autrement dit, la représentation sociale que les jeunes se font de la construction des rapports entre hommes et femmes, entre individus de différents groupes ethniques etc., oriente leur conduite et influence grandement l’utilisation ou non de violence dans le règlement de conflits interpersonnels. 
 
 
 
LUNDI 13 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 9e partie 
Un peu plus de la moitié des jeunes interviewés, garçons et filles, reconnaissent que la violence envers les femmes est causée par des attitudes de domination et de mépris de la part des hommes. L’explication donnée pour interpréter la violence de certains hommes envers les femmes repose sur le postulat qu’ils croient en leur supériorité et qu’ils utilisent leur pouvoir, qu’ils ont besoin de dominer et de contrôler la femme. Ils ont besoin de prouver leur puissance. Ils n’acceptent pas que les femmes soient égales à l’homme. S’ils ont le sentiment de perdre du pouvoir, ils sont frustrés et développent de l’agressivité. 
(En parlant des hommes violents) « Il a besoin de prouver qu’il est supérieur à 
elle. » (garçon d’origine québécoise). 
 
« (Certains hommes croient que…) le sexe masculin a toujours été supérieur au 
sexe de la femme. « Fait que », un homme qui se fait (…) battre ou qui se fait 
passer devant par une femme, c’est frustrant. » (garçon d’origine québécoise). 
 
 
Cette explication des causes de la violence des hommes contre les femmes s’inspire donc d’une lecture féministe et sociologique de la réalité. C’est à croire que l’analyse féministe pénètre la croyance populaire et permet une nouvelle lecture des rapports entre les hommes et les femmes chez les jeunes ayant pris part à cette étude. Seuls les garçons d’origine haïtienne ne retiennent pas ce facteur dans leur analyse de la violence. La socialisation plus sexiste des garçons et des filles au sein de la famille haïtienne expliquerait-elle cette attitude? 
 
Toutefois, une nette distinction s’opère entre les garçons et les filles sur la deuxième cause de la violence envers les femmes. Ce sont presque exclusivement des garçons qui retiennent les attitudes de provocation et de passivité des filles comme autre facteur explicatif de la violence. Cette pereption des garçons est nourrie par les mythes et les préjugés voulant que la femme soit un peu responsable de ce qui lui arrive. Ce préjugé sous-entend que les femmes ne savent pas s’y prendre avec leur conjoint. Par leurs attitudes, elles provoquent leur colère. D’après Lacombe, bon nombre de mythes et de préjugés persistent encore en fonction de nos croyances, de notre éducation et de notre milieu. Ainsi, ce préjugé voulant que les femmes provoquent fait partie de la liste des préjugés les plus tenaces tels que : l’alcool est la cause de la violence conjugale, l’agresseur est malade, la violence se transmet d’une génération à l’autre, l’agressivité est naturelle chez les hommes. 
« Il faut dire que les filles le cherchent des fois (…) Parce qu’il y a des 
filles qui sont bien « agaces ». Pis elles vont coller un, elles vont aller 
coller l’autre. » (garçon d’origine québécoise) 
 
 
Enfin, un troisième facteur explicatif retenu par les jeunes interviewés est l’abus de drogues et d’alcool. C’est une variable évidente de renforcement des attitudes et des comportements violents mais non une cause. Malgré tout, il a été rapporté par quelques jeunes pour expliquer les causes de la violence conjugale. 
 
Ces résultats nous font réaliser l’importance de situer les facteurs explicatifs de la violence dans leur globalité et d’aider les jeunes à distinguer les facteurs de renforcements d’attitudes et de comportements des causes réelles de la violence. Cette clarification est d’autant plus importante que la violence est souvent excusée par une soi-disant perte de contrôle due à des facteurs comme l’abus de drogues ou d’alcool; ceci empêche l’individu de réfléchir sur les réelles motivations des comportements violents et de prendre consicence que ce sont ces mythes et ces préjugés qui renforcent l’idée que les femmes sont en partie responsables de l’agression qu’elles subissent. Il importe d’aider les jeunes à reocnnaître qu’ils ont des préjugés, puis de les identifier et de les aider à les combattre afin d’éviter qu’ils guident leur conduite. 
 
La résolution des conflits passe parfois par la violence lorsque les autres moyens qui font partie du répertoire de stratégies pour résoudre les conflits ont échoué. Les jeunes l’appellent perte de contrôle dans leur discours manifeste. Mais lorqu’ils en expliquent la nature, la plupart reconnaissent que la traditionnelle perte de contrôle n’est rien d’autre qu’un moyen utilisé pour prendre du contrôle et du pouvoir sur ce qui les entoure. C’est ce que révèle leur discours latent. La notion de perte de contrôle est alors utilisée afin de justifier ou de camoufler un acte répréhensible socialement et qui n’est en réalité qu’un désir de prise de contrôle. 
 
 
 
VENDREDI 10 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 8e partie 
LES REPRÉSENTATIONS DE LA VIOLENCE CHEZ LES JEUNES 
 
Dans le cadre de l’étude réalisée, les jeunes, qu’ils soient filles ou garçons, qu’ils soient d’origine québécoise ou d’origine haïtienne, définissent la violence sensiblement de la même façon. Il existe peu de différence entre les groupes quant à l’image qu’ils se font de la violence. Ils utilisent un discours représentatif de leurs conditions de jeunes. Ce discours n’est pas lié aux différences qui peuvent exister entre chacun de ces quatre groupes de l’échantillon. Il reflète, avant toutes choses, une culture propre à l’adolescence. Les seules différences qui ont été observées entre les groupes concernent les causes de la violence. 
 
Selon les jeunes interviewés, l’agression physique est en quelque sorte le baromèetre de la violence. Plusieurs jeunes soutiennent que s’ils ne sont pas agressés physiquement, ils ne sont pas victimes de violence. Pour eux, la violenc est surtout associée à des gestes physiques et brutaux, ce qui est d’ailleurs socialement admis. 
 
« C’est quand quelqu’un veut battre (…) une autre personne inutilement. » (fille d’origine québécoise) 
« Tout contact qui est physique, (…) brutal entre deux personnes. » (fille d’origine haïtienne). 
 
L’agression verbale et l’agression psychologique sont reconnues par les jeunes. Mais la majorité considère qu’elles ne sont pas aussi violentes que l’agression physique. 
 
(En parlant de la violence verbale ou psychologique) « Non c’est pas de la violence, mais je ne me sens pas très bien quand on me dit ça. » (garçon d’origine haïtienne). 
 
« Tu peux dire n’importe quoi violemment mais ça touchera pas tout le monde » (fille d’origine haïtienne). 
 
La notion de méchanceté qualifie mieux à leurs yeux l’agression verbale et psychologique. Pourtant, la cruauté mentale et les déchirements de cœur sont beaucoup plus destructeurs que la violence physique, selon nombre de femmes violentées (MacLeod). La majorité des jeunes interviewés sous-estiment donc les impacts de la violence psychologique quoique certains, parmi les plus âgés, en comprennent très bien les conséquences destructrices. Les jeunes croient que la meilleure façon d’évaluer s’il y a ou non violence est la souffrance ressentie. Et la souffrance qui paraît la plus évidente à leurs yeux, c’est la souffrance physique. Si l’individu est blessé, c’est qu’il a été atteint par une agression. Les blessures de l’âme, quant à elles, sont invisibles. 
 
La notion de violence est par conséquent perçue différemment par les jeunes et par les intervenants et les intervenantes. Alors que ces derniers retiennent généralement une définition très large de la violence, les jeunes la définissent de façon plus restrictive et plus limitée. Cette compréhension réduite de la violence par les jeunes rappelle l’importance de clarifier cette notion auprès d’eux afin de la situer dans toute sa globalité. 
 
Lorsqu’on aborde les causes de la violence, une distinction s’opère entre les groupes, tantôt à propos de la violence envers les femmes, tantôt à propos de la violence interethnique. Pour les fins de cet article, examinons leurs explications des causes de la violence envers les femmes. Dans le cadre des rapports entre les hommes et les femmes, les jeunes reconnaissent que les hommes sont plus violents que les femmes. Toutefois, il est plus difficile pour les jeunes garçons de se représenter la violence dans les rapports intimes entre partenaires à l’adolescence. Le jeune âge ainsi que la fonction de désirabilité sociale expliquent en bonne partie la nature de ces résultats. 
 
 
JEUDI 9 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 6e partie 
La conjugaison de ces facteurs peut avoir pour effet de restreindre le répertoire de stratégies qu’un individu possède pour se sortir d’une situation conflictuelle et l’inviter à utiliser un comportement violent pour contrer un sentiment d’impuissance. Mais comment expliquer que la cible de comportements violents est plus souvent une catégorie d’indivdus qu’une autre? Dans le cadre de la violence conjugale certains facteurs sociaux sont alors déterminants, en ce sens qu’ils contribuent et incitent à certains types de violence contre les femmes eu égard à l’oppression dont elles sont victimes. Afin d’expliquer cette violence envers les femmes, Larouche (in Larouche et Gagné) propose un regroupement des facteurs de risque en trois grandes catégories. La première réfère à ce qui crée une relation de pouvoir entre les hommes et les femmes; l’auteure parle alors d’ « incitateurs » en faisant allusion à l’enseignement des stéréotypes traditionnels et des rôles sexistes aux enfants dans les écoles, dans la famille et dans les médias ansi qu’à la pornographie, la violence à la télévision et enfin à tout ce qui incite à user de violence envers les femmes. La deuxième catégorie renvoie aux facteurs qui renforcent la violence. Selon l’auteure, l’homme abusif s’en sert pour justifier, minimiser et se déresponsabiliser de la violence qu’il produit. Il s’agit en réalité de l’allégeance aux stéréotypes masculins et de l’intégration de la notion de pouvoir. Finalement, la troisième catégorie concerne les facteurs qui augmentent la tolérance des victimes tels que les stéréotypes féminins ou ce que l’auteure appelle l’ « incapcité apprise », c’est-à-dire les facteurs personnels qui augmentent la tolérance à la violence, et enfin les discours et les mythes qui entretiennent la position de la violence tels que : « la femme battue est masochiste » (Lacombe). 
 
Dans toutes les formes de violence, l’acte de violence n’est-il qu’un geste de domination de la part de l’agresseur, qu’une façon d’établir son autorité et de régler les conflits sans avoir à négocier? Et cela, qu’il s’agisse de la violence envers les femmes, de la violence envers les minorités ethniques et, pourquoi pas, de la violence tournée contre soi-même. L’agression ou l’acte violent est alors compris comme une façon de se sortir des conflits, une façon de prendre et d’affirmer un pouvoir afin d’exister comme individu. Le choix des victimes dépend de la socialisation de l’individu. Et cette socialisation n’est que le reflet d’un ensemble de facteurs sociaux qui contribuent à renforcer des conditions sociales inégales entre certaines catégories d’individus. Examinons maintenant comment les jeunes interviewés au cours de cette recherche se représentent la violence. 
 
MERCREDI 8 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 5e partie 
L’appartenance à une communauté culturelle minoritaire et à une minorité visible constitue un risque supplémentaire (CCCI). On n’a qu’à penser à la surreprésentation des jeunes de minorités ethniques aux prises avec des problèmes de comportement importants nécessitant un placement en centre d’accueil. En 2000, les jeunes des communautés culturelles constituaient 30% des jeunes placés en centres fermés, en vertu des mesures de protection ou à la suite d’un délit grave (CCCI). Les facteurs explicatifs sont les problèmes situationnels et économiques découlant de l’expérience migratoire, les problèmes relationnels au sein des familles dans un contexte pluriculturel et multiracial, les problèmes personnels dans leur tentative pour se définir une identité positive alors que la majorité leur renvoie une image négative et enfin l’incapacité de certaines institutions d’offrir l’aide opportune et efficace pour répondre aux situations de crise. 
 
La bande de jeunes peut également influencer l’adoption d’attitudes et de comportements violents. Un individu dont les liens familiaux sont précaires risque de retrouver dans les gangs de jeunes criminalisés un groupe de référence sur lequel s’appuyer. De surcroît, dans nos sociétés modernes, les jeunes se sentent seuls face à un devenir pour le moins incertain. L’individualisme, la réduction des programmes sociaux et la priorité des lois du marché sont les vertus premières prônées par notre système social pour gérer les rapports sociaux. La loi de la concurrence est féroce et les plus faibles sont rejetés. Dans un tel contexte, le recours à la force devient pour certains individus la seule façon d’exister et d’affirmer son identité. En outre, la promotion par les différents médias de la violence comme moyen efficace de résolution de conflits est un autre facteur qui ne contribue pas à l’apparition du phénomène de la violence mais qui favorise sans doute son amplification (Cohen in LeBlanc). 
 
Enfin, certaines caractéristiques situationnelles conjuguées à d’autres facteurs peuvent élever sensiblement le risque d’utilisation de comportements agressifs. Songeons par exemple à l’abus d’alcool ou de drogues. De plus, les conditions de l’environnement tels le bruit, la chaleur et la densité de la population sont des caractéristiques physiques qui peuvent influencer les conduites mais elles sont étroitement liées à des variables cognitives intermédiaires qui conditionnent le comportement du sujet. Ces variables cognitives sont l’évaluation de la situation comme agréable ou non ainsi que le sentiment que le sujet a le pouvoir d’y échapper s’il le désire (Moser). 
 
Bref, il n’existe pas de cause unique pouvant expliquer le recours à la force brutale dans les rapports interpersonnels. Pour expliquer l’agression ou la violence, il faut tenir compte de l’interaction de variables personnelles, familiales et environnementales (structurelles, socio-économiques, culturelles et stituationnelles). Pour comprendre ce qui engendre un comportement violent, il faut étudier et analyser les différents facteurs du processus et du contexte d’apprentissage dans lequel le jeune a évolué et évolue quotidiennement. 
 
MARDI 7 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 4e partie 
FACTEURS DE RISQUES (SUITE) 
 
Le deuxième groupe des facteurs retenus par les auteurs englobe les variables familiales. Plusieurs auteurs s’accordent pour dire que la famille a un rôle prédominant à jouer dans le développement ou non chez un jeune de comportement ou non chez un jeune de comportements agressifs. Toutes les familles ne possèdent pas des conditions sociales et économiques favorables au développement d’un climat familial adéquat. Aussi, les parents qui ne peuvent offrir une supervision adéquate, une cohérence entre les conduites et leur verbalisation, des modèles efficaces de communication et de résolution des conflits, une éducation basée sur des relations affectives et des règles équitables pour tous les membres de la famille favorisent le développement de comportements antisociaux chez leurs enfants (Hébert). 
 
En troisième lieu, les auteurs ont identifié différentes variables que nous qualifions d’environnementales. Cette catégorie inclut les facteurs structuraux et socio-économiques, les facteurs institutionnels du milieu scolaire, les facteurs liés aux groupes d’appartenance, les facteurs culturels et situationnels. 
 
Le lien étroit entre la pauvreté et la violence est confirmé par de nombreuses études (Chenais et al. In Hébert). Toutefois, dans les recherches concernant la violence familiale on observe que ce n’est pas tant le statut socio-économique des familles qui prédispose à la violence que les ressources sociales limitées et les frustrations inhérentes aux rôles familiaux et occupationnels qui sont associées à ce statut économique (Steinmetz et Straus in Lamoureux). Les mauvaises conditions de logement, de travail, de santé et de loisirs ainsi qu’un revenu insuffisant et la faiblesse d’un réseau de soutien social sont tous des sources évidentes de stress et peuvent provoquer de l’insécurité, des tensions et des conflits. 
 
Par ailleurs, la réalité de domination culturelle, religieuse, légale, économique et sociale des femmes et des enfants a engendré plusieurs formes d’abus de pouvoir et de violence au sein des familles de la part des hommes (l’ARIHV). Aujourd’hui, même sis ces structures sont en mutation, les femmes demeurent largement absentes des véritables postes de pouvoir. Il existe toujours des inégalités entre la condition des hommes et la condition des femmes, ce qui laisse place à des abus de pouvoir et à la violence. 
 
Un grand nombre des actes de violence des jeunes se passent à l’école ou autour de celle-ci. L’école comme institution a un rôle important à jouer dans le développement ou non d’attitudes et de comportements violents chez les jeunes. Certains facteurs institutionnels viennent influencer l’incidence de la violence. Les attitudes et les comportements du personnel scolaire, l’école comme milieu physique et social, la composition des effectifs scolaires et enfin les valeurs éducatives et les régimes pédagogiques sont autant de variables qui interfèrent dans le développement d’attitudes et de comportements violents (Caouette). 
 
 
LUNDI 6 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 3e partie 
LES FACTEURS DE RISQUE 
 
Examinons tout d’abord les facteurs personnels. Plusieurs recherches ont tenté d’expliquer les facteurs physiologiques et psychiques associés aux comportements violents d’un individu. Cependant, ces facteurs sont indissociables des facteurs familiaux, environnementaux ainsi que du processus et du contexte de socialisation de l’individu. 
 
Depuis de nombreuses années, le fonctionnement physiologique est scruté à la loupe afin de localiser les désordres organiques permettant d’expliquer l’agression à partir de pulsions physiques. On est passé de la recherche d’une infériorité constitutionnelle (chromosome surnuméraire) chez le criminel aux études qui ont tenté d’établir un lien direct entre le niveau de testostérones d’un individu et l’expression de sa violence. Toutefois, ces recherches n’ont pas permis d’apporter de preuves concluantes (Barker et Boissonnault). 
 
Sur le plan psychologique, deux types de recherches ont été menés avec des résultats mitigés (Lamoureux). Dans le premier type, les recherches analysent les caractéristiques de personnalité prédisposant les sujets dits « normaux » à s’engager dans une agression. Dans le second, elles étudient les caractéristiques de personnalité des sujets présentant des comportements agressifs ou s’étant engagés dans des actes d’extrême violence. 
 
Plusieurs de ces recherches postulent que certains traits de personnalité peuvent contribuer à ce que le sujet s’engage plus volontairement dans des conduites d’agression. Ainsi, on a observé chez certains jeunes agressifs une difficulté permanente à modifier un comportement acquis (Morisette in Lamoureux). Au lieu de remettre en cause leur comportement agressif, certains jeunes développeraient des résistances leur permettant de renforcer ce type de comportement. Cette attitude limiterait son pouvoir d’apprentissage ou d’adaptation. Quant aux réactions émotionnelles, les auteurs identifient la faible tolérance à la frustration et la recherche d’une satisfaction immédiate, sans considération aucune d’autrui ou des contraintes extérieures (égocentrisme). Selon Lemay (in Lamoureux), les difficultés cognitives d’un jeune violent découlent de son jugement moral qui se limite à une moralité égocentrique. Cette moralité rejette par le fait même des valeurs de réciprocité, de convergence ou de maintien de l’ordre moral et social. Enfin, les jeunes ayant une faible estime ou une trop forte estime d’eux-mêmes présenteraient des risques plus élevés d’être rejetés par leurs pairs prosociaux et d’adopter des comportements inadaptés (carrier et al. In Hébert). 
 
VENDREDI 3 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 2e partie 
LES PERSPECTIVES D’ANALYSE 
 
Pour André Gobeil et Francine Ouellet, les psychologues et les sociologues ont développé plusieurs théories dans leurs recherches pour expliquer le phénomène de l’agression et comprendre les facteurs pouvant conduire un individu à adopter des attitudes et des comportements violents. La majorité des approches sont de conception monocausale, c’est-à-dire qu’une cause unique est censée rendre compte de l’ensemble des manifestations du comportement d’agression. Mais la violence ne peut s’expliquer uniquement par des composantes agressives de la personnalité humaine. Selon Hébert, il faut tenir compte de l’interaction de multiples variables individuelles, familiales et environnementales où les rôles des apprentissages cognitif et social sont déterminants. 
 
L’approche de la violence qui est retenue s’inspire de plusieurs théories. La théorie de la frustration, plus particulièrement par le biais du concept d’apprentissage social de comportements agressifs (Bandura), sert de toile de fond. Associée à cette approche, se superpose l’approche sociologique qui permet d’identifier les diverses sources de frustration dans l’environnement d’un individu (Mackal). Puis, se greffe la perspective cognitive qui explique l’interprétation faite par un individu de la source de frustration. C’est cette interprétation qui guidera ses conduites et ses actions. Enfin, la théorie de la socialisation réinterprétée par les théoriciennes féministes vient ajouter une couleur à la théorie de l’apprentissage social qui sert de canevas à cette étude. La définition de la socialisation s’inspire à la fois de la sociologie et de la psychologie et converge vers un même point : l’intégration des valeurs sociales (Drolet). Les principaux agents de socialisation sont la famille, l’école, les médias et les groupes d’appartenance. 
 
L’utilisation de comportements agressifs par un individu ne s’explique pas de façon mécaniste. On peut chercher les causes multiples de tels comportements mais il importe, avant toutes choses, de résituer ces comportements dans leur contexte, de les distinguer les uns des autres et de les nuancer. Étant donné que les agresseurs n’ont pas tous la même force physique ni le même pouvoir social, on peut s’attendre à ce que les conséquences et les motifs de leur violence diffèrent aussi. 
 
C’est sans nul doute l’analyse féministe du phénomène de la violence qui situe le mieux l’agression et la violence dans le contexte des rapports sociaux. Elle nous rappelle l’importance de considérer le contexte socio-politique entourant le rôle social joué par certains agresseurs dans leurs rapports sociaux avec les victimes. L’approche féministe insiste sur le fait que, dans notre société sexiste et patriarcale, les femmes et les enfants sont les victimes de la violence familiale, tandis que les hommes en sont les auteurs. Il est essentiel de situer l’agresseur dans sa position sociale pour comprendre les gestes posés. Lorsqu’on a affaire à l’agression d’un homme envers une femme, l’analyse féministe explique les gestes de l’homme comme étant une recherche de satisfaction de son besoin de domination et de contrôle (Larouche et Gagné; Lacombe). L’agression et la violence deviennent alors l’expression d’un pouvoir et d’une domination, le besoin de renforcer un contrôle sur la victime. N’est-ce pas le même phénomène d’affirmation d’un pouvoir qui entre en jeu dans les agressions entre jeunes d’origines ethniques différentes ou dans les cas d’agressions contre des jeunes marginalisés, soit par leur orientation sexuelle, leur origine ethnique, leur handicap physique, mental ou autre? 
 
C’est donc dans l’interaction de plusieurs variables que s’expliquent l’agression et la violence. Ces variables peuvent être groupées en facteurs personnels, familiaux et environnementaux (structurels et socio-économiques, culturels et situationnels). 
 
 
JEUDI 2 DÉCEMBRE 2010 
VIOLENCE CHEZ LES JEUNES - 1e partie 
LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DE LA VIOLENCE CHEZ DES JEUNES 
 
Depuis quelques années, la violence est examinée sous tous ses aspects. Les journalistes, les chercheurs et les intervenants la questionnent, l’analysent et l’interprètent. Il ne se passe pas une semaine sans que notre imaginaire soit touché par un article ou une émission qui traite de manifestations de violence. Le sujet soulève des émotions voire même des passions. 
 
Mais les jeunes, eux, qu’en pensent-ils? Comment définissent-ils la violence? Quelle représentation se font-ils de ses manifestations et de ses causes? Quelle signification donnent-ils à son utilisation? À part certaines recherches en victimologie (Kraus; Dumas; Abrahams et al.; Robitaille), il existe peu ou pas d’étude concernant la perception ou la représentation sociale que les jeunes se font de la violence. 
 
En donnant la parole aux jeunes, l’objet de cette étude était de comprendre le sens qu’ils accordent à l’expression entre leurs représentations sociales, leurs attitudes et leurs comportements. Ce travail permet ainsi de jeter un nouvel éclairage sur la réalité des jeunes du milieu HLM et, par la même occasion, peut aider les intervenants et les intervenants, souvent dépassés par le phénomène de la violence, à développer de nouvelles pistes d’intervention. 
 
 
Les données ont été recueillies en entrevue semi-dirigée auprès de onze jeunes, garçons et filles, âgés entre quatorze et dix-huit ans, dont la moitié était d’origine haïtienne et l’autre d’origine québécoise. L’échantillon de type non probabiliste et de quotas a été construit à partir des adolescents et des adolescentes qui résidaient dans ce HLM où une intervention collective avait été amorcée, tout en respectant trois critères de sélection, soit l’âge, le sexe et l’origine ethnique. Un schéma d’entrevue à questions ouvertes servait de guide. Les données furent étudiées grâce à l’analyse de contenu de type qualitatif. La notion de représentation sociale servait de cadre de référence à l’analyse comparative entre les quatre groupes de l’échantillon : garçons ou filles, d’origine haïtienne ou d’origine québécoise. 
 
Cet article a pour but de mettre en évidence une hypothèse de la trajectoire de la violence élaborée à partir du discours des jeunes dans le cadre de cette recherche. Pour ce faire, il traduira les représentations sociales que les jeunes interrogés se font de la violence dans le cadre des rapports interpersonnels mais plus spécifiquement des rapports entre les hommes et les femmes. Dans un premier temps, la perspective d’analyse retenue au cours de cette étude sera développée. De plus, les différents facteurs de risque à l’origine de l’expression de la violence seront brièvement exposés. Par la suite, les représentations sociales que les jeunes se font de la violence, de sa définition et de ses causes seront présentées. Puis, une hypothèse de la trajectoire de la violence sera élaborée. Enfin, certaines pistes d’action préventive seront explorées. 
 
 
MERCREDI 1 DÉCEMBRE 2010 
INTERVENTION POUR CONJOINTS - 12e partie 
CONCLUSION 
 
Il se dégage donc de l’ensemble des travaux de recherche que les programmes d’intervention pour conjoints violents permettent de diminuer l’incidence des comportements d’abus. Leur efficacité semble cependant varier selon les groupes, selon les modalités d’intervention et selon les individus. D’autre part, ces programmes semblent avoir des effets qui varient selon le type de violence. En effet, la majorité des programmes que nous avons examinés sont plus performants face à la violence physique vis-à-vis la violence verbale ou psycholoqiue. Ce dernier résultat soulève différentes questions. On peut se demander pourquoi ces formes de violence sont plus résistantes à l’intervention. Est-ce parce que les programmes mettent davantage l’accent sur l’arrêt des comportements de violence physique? Cette persistance de la violence psychologique et verbable est-elle l’expression d’une transformation de la violence physique? D’un manque de conscientisation des hommes face au contrôle qu’ils cherchent à exercer? Ou encore, peut-on penser que les programmes, dans leur forme actuelle, sont davantage outillés pour agir sur la modification des comportements plutôt que sur les attitudes? Il s’agit là d’autant de questions sur lesquelles il faudra se pencher enfin de mieux comprendre les actions à privilégier afin de mettre fin à la violence faite aux femmes 
 
SAMEDI 3 JUILLET 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 8e partie 
Conclusion 
 
Un tel projet présente l’immense avantage d’animer les milieux scolaires d’une façon nouvelle et de les amener, comme systèmes entiers, à aborder l’épineuse question de la violence entre les enfants. Tous les acteurs reconnaissent le problème, mais chacun demeure encore trop isolé dans ses perceptions et ses actions. Le projet a eu l’audace de poser le problème et de suggérer des avenues de solution. Certes, ses résultats ne sont pas renversants, mais ils témoignent de l’effort et d’un certain succès. Tout au moins, ils renforcent les positions de Beaumont, de Fraser, de Simard, Champagne, Magassouba et Hébert et de Meunier : il est nécessaire de sensibiliser tous les acteurs aux phénomènes de violence à l’école, d’aider les enfants à se respecter mutuellement en leur offrant une formation civique aux habiletés sociales de base, de leur offrir des activités de loisirs et de les encadrer par la surveillance, l’intervention et la stimulation. 
 
L’intimidation présente toutes les caractéristiques de la violence (Meunier) : a) des intentions immédiates (par ex. faire mal) et médiates (par ex. créer un effet de contrôle/domination sur l’autre) qui cerne l’exercice du pouvoir; b) le climat et le contexte des transactions interpersonnelles; c) la recherche d’une gratification personnelle; d) au détriment de l’autre (par ex. de sa personne, de ses biens, de son image…). Cependant, pour enrayer cette violence plusieurs stratégies simultanées doivent être mises en place. Le projet Violence entre les pairs – Solution communautaire semble un excellent départ dans ce sens. Il pourrait s’y ajouter un programme spécifiquement axé sur l’apprentissage, chez les jeunes et chez les adultes, des conduites pouvant désamorcer l’intimidation. Ainsi, faudrait-il développer une sensibilité aux conditions propices à l’intimidation en se basant sur la description et les critères énoncés par Smith et Thompson : l’intimidation est non provoquée, elle est répétée, et l’agresseur est, dans les faits ou est perçu, plus fort que sa victime. En conséquence, lorsque incité à trancher une situation d’intimidation, l’adulte devrait en tenir compte. Cette stratégie est encore peu développée : au-delà de l’apprentissage des comportements pro-sociaux ou des conduites pacifiques, il faut apprendre aux enfants comment se défendre, comment désamorcer chacune des situations potentiellement conflictuelles (Meunier); la recommandation de faire appel à un adulte n’est pas suffisante. Bref, il faut leur apprendre à bien vivre en société. Nous avons encore beaucoup de chemin à faire! 
 
VENDREDI 2 JUILLET 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 7e partie 
Quelques leçons pratiques… 
 
La collaboration de tous les acteurs est essentielle au succès de tels projets. La formation des comités fut précieuse à cet égard. Cependant, le projet fut précieux à cet égard. Cependant, le projet fut proposé aux écoles et non créé par celles-ci; aussi, à répéter l’expérience, faudrait-il prévoir davantage de temps et d’énergie à harmoniser les conceptions de la violence et de l’intimidation, à créer une véritable synergie autour de la question et des modalités d’intervention proposées dans le projet. Il importe que la direction soit bien enracinée dans la communauté desservie par l’école. La clef du succès réside dans la flexibilité et le respect de la culture du milieu (école, quartier). Le principe de fond demeure toujours que l’école a la responsabilité d’initier un climat et des pratiques favorisant l’harmonie entre les enfants, de fournir aux parents des moyens pour intervenir auprès de leurs enfants, qu’ils soient victimes, abuseurs ou témoins de cette violence. 
 
La sensibilisation de tous les acteurs à l’intimidation est essentielle au programme. Certains se disent déjà très sensibles au problème, mais plusieurs d’entre eux éprouvent des difficultés à le définir et à l’identifier sur le terrain. Il est donc nécessaire d’en parler, d’allouer plus de temps à la formation du personnel scolaire (de la direction au personnel clérical et des transports), de lui fournir des outils pratiques pour observer les situations de conflit, les désamorcer et intervenir efficacement. 
 
Les activités présentées aux enfants doivent éveiller leur intérêt et faciliter leurs apprentissages. Aussi, les sessions en classes portant sur les habiletés sociales de base doivent être très concrètes, simples, directes et accessibles aux enfants (beaucoup de matériel visuel et tactile, des manipulations, des jeux de rôles, affiches, bandes dessinées géantes, concours de toutes sortes…). Les élèves plus âgés peuvent être sollicités pour animer les jeux des plus jeunes, responsabilités que plusieurs adorent; les plus négatifs, opposant refus ou obstruction, peuvent être retirés de la cour de récréation aux moments opportuns. Les activités de groupe, pour victimes ou pour agresseurs, doivent être bien présentées aux enfants; un travail de sensibilisation aux difficultés personnelles et aux avantages de l’entraide doit commencer dès le début du projet, impliquer les enfants et leurs parents. Par ailleurs, pour favoriser l’homogénéité des groupes, il est bon d’éviter un trop grand écart d’âge entre les participants, et même de tenir compte des niveaux de scolarité. En outre, le bon fonctionnement des groupes est favorisé par l’assiduité et la ponctualité des enfants; les parents et les enseignantes doivent donc être mis à contribution. 
 
L’implication des organismes communautaires du secteur est un atout de taille. Ils représentent un excellent complément aux initiatives de l’école et ont ainsi l’occasion de se faire connaître dans un contexte non menaçant. Ils peuvent, à plus long terme, accompagner les enfants et les familles dans leurs difficultés. Quoique parfois fragile, c’est un partenariat essentiel. Une difficulté fut ici d’assurer la stabilité à long terme du personnel recruté pour les activités de la période du dîner. Diverses formules furent essayées; la co-animation par un membre de la communauté (à contrat ou bénévole) renforcée par la présence d’un animateur professionnel (interne ou externe à l’école) a semblé la meilleure formule. 
 
Certains parents semblent dépassés; l’école doit alors fournir la consultation et des outils leur permettant d’accompagner leurs enfants tout au long des activités de l’année. Le rapprochement des organismes communautaires peut s’avérer un de ces outils. 
 
Enfin, et non de moindre importance, les activités de tels programmes ne devraient pas nécessiter de changements structurels d’importance dans l’école (personnel, locaux, mobilier, horaire…) ou dans la présentation des activités scolaires. Au contraire, elles devraient pouvoir s’harmoniser aux activités normales, tout comme celles qui soutiennent le projet pédagogique d’école. 
 
JEUDI 1 JUILLET 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 6e partie 
Discussion des résultats 
 
Cette brève analyse comparative des données des sondages souligne que les acteurs des trois écoles ont eu l’occasion de se sensibiliser aux phénomènes de l’intimidation. En outre, il semble qu’une intervention des adultes, en particulier des enseignantes, commence à se structurer et à s’exprimer plus ouvertement. Les enfants ne perçoivent cependant pas beaucoup de différence dans les réactions des enseignantes. Il semble toutefois que leurs comportements d’intimidation ont, somme toute, subi des transformations sans toutefois être éliminés. 
 
Donner une appréciation des résultats en fonction des conditions d’expérience du projet est difficile en raison d’influences intermédiaires importantes, perceptibles dans les trois écoles, mais reflétées par des variables différentes d’une école à l’autre. Par exemple, l’animation des activités de loisirs au cours de la période du dîner fut quelque peu rendue difficile et différente d’une école à l’autre, en raison de problèmes de recrutement d’un personnel qualifié. Plusieurs autres adaptations durent être favorisées dans chacune des trois écoles. 
 
Cinq critères sont proposés afin d’orienter une conclusion qui, par la force des choses, doit être considérée comme une humble perception clinique de la dynamique engendrée par le projet. Chaque école reçoit de une à trois étoiles (*, **, ***) selon le niveau de performance qu’elle présente à chacun des critères; recevoir trois étoiles traduit une meilleure réussite. La somme de ces étoiles permet d’établir une certaine différence entre les écoles. Le niveau de sensibilisation des acteurs à l’intimidation est le premier critère : chaque école reçoit deux étoiles. Le changement du niveau d’intervention face aux situations d’intimidation est un deuxième critère : les écoles B et A obtiennent deux étoiles, et l’école C, une étoile. Le troisième critère est celui de la modification des comportements des élèves devant des situations d’intimidation : des modifications sont observées dans plusieurs comportements, mais aucune constante ne peut en être dégagée : aussi, deux étoiles sont attribuées à chacune des écoles. Le quatrième critère est celui de la modification des réactions des enseignantes à l’intimidation : les écoles A et C reçoivent chacune trois étoiles, et l’école B en reçoit deux. Le dernier critère est celui de la modification des réactions des élèves à l’intimidation : l’école A reçoit trois écoles, l’école B, deux étoiles, et l’école C, une étoile. La somme de ces étoiles permet d’établir que la formule présentée à l’école A (sensibilisation du personnel enseignant, des parents et des parents) + animation dans la cour d’école) + habiletés sociales de base en classes + intervention auprès des groupes d’enfants ciblés) semble présenter un très léger avantage sur les deux autres; celle présentée à l’école B (sensibilisation du personnel enseignant, des parents et des enfants) + (animation dans la cour d’école) + (habiletés sociales de base en classes) semble présenter un léger avantage sur celle présentée à l’école C (sensibilisation du personnel enseignant, des parents et des enfants) + (animation dans la cour d’école). En somme, les acteurs des trois écoles semblent avoir tiré quelque profit de leur expérience, mais aucune formule ne semble franchement se démarquer. 
 
 
 
MARDI 29 JUIN 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 5e partie 
Résultats 
 
La participation aux activités du projet, de l’avis de tous, a permis des améliorations tangibles et observables. Des constats cliniques et la comparaison des réponses aux deux sondages (Meunier) supportent de telles conclusions. 
 
Les enseignantes et les directions d’école soulignent une diminution du nombre et de la gravité des incidents de violence à l’école; les énergies des enfants semblent canalisées de façon positive. Les parents communiquent plus souvent avec la direction de l’école lorsqu’un enfant se dit victime de violence. Les enfants rapportent davantage les incidents d’intimidation. Ils disent se sentir plus en sécurité et ont hâte aux périodes du midi. Les enfants ciblés en raison de leurs comportements agressifs semblent avoir appris à mieux orienter leurs actions vers des buts plus constructifs et à établir des relations plus positives avec leurs pairs. 
 
À la suite du projet, les propos des enseignantes manifestent une sensibilisation accrue aux situations d’intimidation; elles se disent plus actives et concernées. À l’école A, selon les enseignantes, l’intervention de médiation entre les enfants semble plus importante à la fin de l’année. Les parents expriment des opinions qui supportent la perception des enseignantes : celles-ci leur semblent davantage intervenir dans les situations d’intimidation, en particulier par la médiation. Les élèves, eux, n’observent aucun changement dans la réaction de leurs enseignements. Les élèves, aux dires des enseignantes de l’école B, sont plus actifs, en fin d’année, à trouver des moyens d’aider leurs pairs impliqués dans des situations d’intimidation. Selon les enseignantes des écoles A et C, ils déploient davantage de moyens permettant d’aider leurs paris et demandent de l’aide auprès d’un adulte. Les enfants, de leur côté, expriment des vues quelque peu modifiées suite au projet. Les signes d’ignorance des situations d’intimidation apparaissent moindres à l’école B, inchangés à l’école C, et plus grands à l’école A. Les réactions de fuite semblent moins nombreuses aux écoles B et A, et semblables à l’école C. Les manifestations de sympathie et d’aide semblent augmentées à l’école A, inchangées à l’école C, et moindres à l’école B. 
 
Les agresseurs – les élèves qui intimident – présentent toujours, à la fin de l’année, les caractéristiques suivantes : ce sont surtout des garçons, même si les filles n’en sont pas exemptes, en particulier aux écoles A et C; ils sont plus vieux que leurs victimes et généralement du même niveau scolaire. Dans les trois écoles, le comportement auquel les enfants semblent plus sensibles est la moquerie : plaisanteries, railleries et sarcasmes, attributions de qualificatifs blessants, etc. Le cadre de ce comportement semble très souvent lié au peu de respect des caractéristiques personnelles (différences) chez les pairs. Le motif majeur derrière ce comportement semble le besoin de se singulariser par l’image et le pouvoir. 
 
En fin d’année, les interventions des enseignantes semblent orientées tant auprès des enfants-agresseurs (surtout dans les écoles B et A) qu’auprès des enfants-victimes d’intimidation. Les parents et les enfants semblent percevoir davantage l’intervention des parents auprès des enfants-agresseurs. Selon les enfants, l’intervention des enseignantes et des parents auprès des enfants-victimes semble importante. À l’école B, l’intervention d’un ami auprès de l’enfant-victime l’est également. Les conseils prodigués aux enfants intimidés demeurent toujours, chez les enseignantes et chez les parents, de demander l’aide d’un adulte. Les enfants, eux, suggèrent avant tout de se protéger en s’éloignant des endroits où se trouvent les élèves qui intimident (agresseurs). 
 

LUNDI 28 JUIN 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 4e partie 
Le projet 
 
Le projet proposait « d’élaborer, d’implanter et d’évaluer trois activités qui ont le potentiel d’avoir un impact sur le climat d’une école, en diminuant les incidents d’intimidation. Il s’agit de mesurer les bénéfices engendrés par chacune des trois activités suivantes : - une période les bénéfices engendrés par chacune des trois activités suivantes : - une période de loisirs structurée à l’heure du dîner, - la sensibilisation de tous les élèves de l’école au phénomène de l’intimidation et – l’intervention de groupe pour les élèves victimes et les élèves qui intimident (Décoste). Quatre étapes ont été suivies. La première fut de sélectionner des écoles où implanter le projet. Trois écoles primaires furent retenues pour leurs caractéristiques de relative homogénéité : elles offraient des classes de la maternelle à la huitième année, présentaient des effectifs étudiants entre 140 et 170 élèves, étaient situées à quelques kilomètres à l’est de la ville d’Ottawa; leurs milieux socio-économiques étaient caractérisés par la vie de banlieue, semi-urbaine, pour une population à majorité de race blanche et de revenus moyens. Dans les trois écoles, le personnel enseignant se disait prêt à accueillir le projet dans sa forme prévue. Les parents en ont été informés. 
 
Puis vint la formation de comités de soutien : un comité consultatif qui chapeaute le projet et trois comités locaux école-communauté, permettant ainsi d’assurer le respect de la spécificité de chaque communauté scolaire. Des parents ont aussi accepté de siéger à ces comités; ils ont contribué à mieux faire connaître la culture de leur milieu et les modalités les plus propices à susciter la collaboration des parents. Ensuite, des organismes communautaires du milieu furent invités à apporter leur contribution au projet. Le Centre psychosocial pour enfants et familles ainsi que le Bureau des services à la jeunesse ont accepté de dispenser les activités de groupes-classes, pour les habiletés sociales et d’animer les groupes pour victimes et pour agresseurs. 
 
Les activités offertes dans les écoles ont pris des formes diverses. 
 
Deux sondages ont été menés : un premier en début d’exercice et un second, après les activités. Ces sondages, sous forme de courts questionnaires, s’enquéraient du climat de l’école, de la perception de l’intimidation et des réactions à celle-ci. Tous, directions, enseignantes, parents et enfants ont participé à des ateliers des sensibilisations aux incidents d’intimidation. Ces ateliers avaient pour but de les renseigner sur l’intimidation, sur ses formes et sur ses conséquences, et de développer certaines compétences afin de la prévenir et de mieux la gérer. En outre, des activités de loisirs à l’heure du midi ont été organisées dans chacune des écoles. Dans deux des trois écoles, des sessions de socialisation aux habiletés sociales de base ont été dispensées. Enfin, dans une école, des sessions de groupe d’entraide ont été organisées à l’intention d’enfants identifiés par le personnel de l’école comme, d’une part, des victimes d’intimidation et, d’autre part, des enfants agresseurs. 
 
DIMANCHE 27 JUIN 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 3e partie 
La problématique de l’intimidation 
 
La problématique de l’intimidation témoigne nécessairement de la qualité des rapports interpersonnels. Pour les besoins du projet élaboré, elle peut être décrite selon les composantes du tableau 1 : des observations ou manifestations de l’intimidation à l’école, des facteurs explicatifs (causes) de ces comportements, des conséquences appréhendées, et quelques formes d’intervention préconisées pour la corriger. 
 
À l’école, plusieurs enfants souffrent de l’intimidation exercée par leurs pairs. Selon le sondage effectué auprès des enseignantes, des parents et des enfants des trois écoles impliquées dans le projet, « les enseignantes en observent sporadiquement, les parents (40%) disent en avoir des échos, les enfants (70%) disent la vivre. Environ 60% des groupes de chaque école estiment le sujet important, assez pour justifier un projet spécifique » (Meunier). La taquinerie mesquine, la moquerie sont des armes favorites pour l’intimidation, de même que diverses formes de rejet ou d’exclusion. Les conclusions de Simard, Champagne, Magassouba et Hébert vont dans le même sens, chez des jeunes du secondaire cette fois. Souvent un phénomène de groupe, autant chez les filles que chez les garçons mais sous des formes différentes, elle implique des enfants plus âgés s’imposant à de plus jeunes. Les enfants témoins de situations d’intimidation semblent impuissants et réagissent, en premier, en rapportant la situation à l’adulte, selon la consigne en usage. Les enseignantes ne semblent cependant pas à l’aise d’intervenir dans ces situations. Plusieurs (27.3%) estiment ne jamais avoir vu ou eu connaissance d’un élève de leur école se faire intimider par un ou des élèves. La réaction la plus courante est d’aider les élèves à trouver une solution après avoir arrêté le comportement de l’élève qui intimide (36%). En somme, la réponse première à l’intimidation semble être un effort de conciliation, ce qui cadre mal avec ses caractéristiques (un rapport de forces, non provoqué, répété). 
 
Les enfants « expliquent la violence surtout par l’ennui » (Décoste). Les enseignantes la relient aux caractéristiques personnelles de la victime (différente, faible, handicapée…). L’explication première accordée au phénomène de l’intimidation évoque l’image de puissance que les agresseurs cultivent au détriment de leurs pairs. Beaumont notait déjà que « …les raisons pour lesquelles les jeunes ont recours à la violence sont (…) le manque de moyens pour s’exprimer, le manque de surveillance ou d’intervention de la part des adultes, de même que le manque d’activités organisées ». Lorsque requis de s’expliquer, les enfants parviennent mal à énoncer les motifs de leurs comportements (Meunier), faute de compréhension des interactions en cause et faute de mots pour les décrire. 
 
Les agressions physiques et/ou psychologiques, les conflits ouverts, la désignation de boucs-émissaires, l’exclusion sont parmi les conséquences proximales de l’intimidation. La perte d’estime de soi, l’éloignement et le retrait des situations sociales normales en sont des conséquences à moyen terme. Et toute cette « dynamique de perdant » mène souvent sur la route du décrochage scolaire, de la délinquance et de l’exclusion sociale (Bouchard; Hébert; Côté; Simard, Champagne, Magassouba et Hébert). 
 
Diverses formes d’intervention sont suggérées pour contrer l’intimidation des jeunes entre eux (voir Boulton), Smith et Levan, Craig et Pepler). Le projet Violence entre pairs – Solutions communautaires proposées « d’élaborer trois programmes, faciles à gérer et à modifier, qui cherchent à inciter l’empathie, la communication efficace et la collaboration » (Décoste). Pour ce, il propose aux enfants quelques habiletés sociales à travers les loisirs, durant la période du dîner, de sensibiliser tous les acteurs de l’école (direction, enseignantes, enfants, parents) aux diverses facettes de l’intimidation, de développer des groupes d’entraide pour les enfants victimes et les enfants agresseurs, les grandes lignes de ce projet sont ici présentées. 
 
 
 
SAMEDI 26 JUIN 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 2e partie 
Pour reprendre Jean-Marc Meunier 
 
L’intimidation 
 
« Même si les autorités scolaires répètent aux élèves de ne pas intimider, il apparaît que ces dernières offrent peu de solutions pour éviter ou désamorcer les situations conflictuelles. Faute de ressources humaines, les écoles tentent de contrôler les comportements inacceptables en mettant en place des systèmes de conséquences punitives » (Décoste). En somme, la réaction de l’adulte est essentiellement de réprimander. 
 
L’intimidation (le « bullying » pour les anglogphones) est décrite comme « une forme de comportement agressif où il y a une combinaison de pouvoir et d’agression » (Craig et Pepler). Boulton et Underwood, dans leur démarche d’étude, reprennent à leur compte la description d’Olweus : 
 
Un enfant fait l’objet d’intimidation lorsque qu’un autre enfant, ou un groupe 
d’enfants, lui disent des choses déplaisantes ou désagréables. C’est aussi de 
l’intimidation lorsqu’un enfant est frappé, reçoit des coups, est menacé, est 
enfermé dans une salle, reçoit des écrits méchants, est envoyé promener, et 
toutes les choses du genre. Ces choses peuvent se produire souvent et il est 
difficile à l’enfant de se défendre. C’est aussi de l’intimidation lorsqu’un 
enfant est taquiné souvent et de façon déplaisante. Ce n’est pas de 
l’intimidation lorsque deux enfants de force à peu près égale se querellent ou 
se battent. 
 
 
Plusieurs auteurs s’en tiennent à la description de Smith et Thompson : 
 
(…) l’intimidation peut être perçue comme un sous-produit du comportement 
agressif. À l’instar de tout comportement agressif, l’intimidation impose une 
blessure à la victime. Cette blessure peut tout autant être physique ou 
psychologique. Trois critères peuvent en outre caractériser l’intimidation : 
elle est non provoquée, elle est répétée, et l’agresseur est ou est perçu plus 
fort que sa victime (dans Boulton et Underwood). 
 
Craig et Pepler parlent de violence physique à l’égard d’un plus faible ou d’un plus petit autant que de violence psychologique par isolement social et par exclusion. De façon générale, l’intimidation est plus souvent rapportée par des plus jeunes; elle l’est moins chez les adolescents, quoique aussi présente (Simard, Champagne, Magassouba et Hébert). Bref, l’intimidation peut être vue comme la résultante de rapports de pouvoir ou de domination entre deux ou plusieurs individus, exprimée par un discours, des attitudes et des comportements systématiques de dévalorisation et d’attaque (DeAauriers; DeAauriers et Meunier). 
 
La problématique de l’intimidation, comme celle de la violence, est encore mal connue. Des travaux sur le sujet ont été initiés en Norvège par Olweus. D’autres auteurs, comme Boulton, Boulton et Underwood, Cullingford et Morrison, Smith et Levan les ont poursuivis. Au Canada, à Toronto en particulier, Craig et Pepler et leurs collaborateurs sont des pionniers dans ce domaine. 
 
 
VENDREDI 25 JUIN 2010 
VIOLENCE DES JEUNES À L'ÉCOLE PRIMAIRE - 1e partie 
De nos jours, très rares sont les écoles exemptes des affres de la violence interpersonnelle. Elles ont à enrayer une tendance très forte des jeunes à imiter les rapports de pouvoir observés chez leurs aînés où le contrôle sur l’autre, imposé par la force physique ou morale, semble profitable. Un enfant sur cinq, et parfois davantage, dès l’école primaire, dit avoir été victime de violence (Craig et Pepler; Meunier). Certains, à l’exemple de Godin, la qualifient de « petite violence » : jambettes, bousculades, chicanes, paroles blessantes, grossièretés, impolitesses….Plusieurs ne remarquent que les comportements de violence physique (coups et blessures, objet lancé, jambettes, bousculades…). Mais, peu à peu, les adultes portent attention aux autres formes de violence, la violence psychologique, émotionnelle, économique, dans leurs formes multiples telles que l’intimidation, la mesquinerie, la manipulation malveillante, la dévalorisation (injures, calomnies, médisances), le sexisme, les menaces, l’exploitation, l’extorsion (le « taxage »)… 
 
Le conseil des écoles catholiques de langue française du Centre-Est d’Ottawa «s’était engagé à développer des moyens pour réduire les incidents d’intimidation dans les écoles » (Décoste). Dans cet esprit, il a supporté la mise sur pied d’un projet-pilote intitulé Violence entre les pairs – Solution communautaire. Ce projet visait deux objectifs principaux : « évaluer deux approches, soit outiller tous les élèves les plus vulnérables et sur les élèves avec des comportements agressifs (et) démontrer comment le déploiement d’activités récréatives structurées et supervisées lors de la période de loisir et diminuer les incidents d’intimidation » (Décoste). La base de la démarche est la concertation entre personnel de l’école, parents, enfants et organismes communautaires. 
 
Cet article présente ce projet et discute de ses résultats. Il s’inspire notamment des écrits de Décoste et de Meunier sur le sujet. En premier, la notion d’intimidation est abordée et sa problématique décrite. Puis, le projet est décrit dans ses principales composantes. Ensuite, quelques résultats sont abordés et discutés, quelques leçons pratiques sont énoncées. La conclusion souligne l’importance de telles initiatives. 
 
Publié par Eddy J. Constant Pierre